Deux unités de vie Alzheimer, baptisées l'Hippocampe, ont ouvert leurs portes, en Octobre 2008, au sein de la maison de retraite l'Orée du Mont, à Halluin. Après vingt ans de gestation.
Elles accueillent chacune douze résidants, des personnes en début de maladie mais qui ne peuvent plus rester seules. Une place en accueil de jour et une place d'hébergement temporaire ont également été créées. Des ateliers mémoire sont organisés avec un objectif : ralentir la progression de la maladie. Cette structure devrait accueillir des malades de toute la métropole.
C'est en 1989 que ce projet est né. Il a donc fallu presque vingt ans pour que la structure voie le jour. Les administrations ont traîné les pieds et ce n'est qu'en 2004 que les fonds ont été débloqués pour la construction des deux unités, d'un coût de 3,5 millions d'euros. Douze personnes y travaillent.
« L'année 2008 qui se termine a vu l'ouverture de L'Hippocampe. L'entité L'Orée du Mont comporte aujourd'hui la maison de retraite dénommée désormais Le Mont des Ages et les unités de vie Alzheimer désignées sous le nom de cet animal marin qui évoque la partie du cerveau qui est touchée dans la pathologie Alzheimer », soulignait samedi Michel Plets,
Une convention tripartie quinquennale a pris effet au 1e janvier 2008. « Cette convention a permis d'obtenir des crédits à hauteur de 424 000 euros par l'Etat et 192 000 euros par le Conseil général. Le projet Alzheimer étant réalisé, il nous faut aujourd'hui regarder vers l'avenir afin de faire vivre les 110 places de notre institution », ajoutait le directeur.
Pour l'année qui vient, la signature de la convention permettra d'accroître l'effectif de 4 aides-soignantes pour L'Hippocampe ; 3 aides-soignantes, un ergothérapeute et une secrétaire à mi-temps pour Le Mont des Ages. En ce qui concerne la formation du personnel, celle-ci sera développée et étendue en 2009.
« A plus longue échéance, il me semble important de faire disparaître les chambres à deux lits qui il y a 20 ans nous ont été imposées par la Caisse Régionale d'Assurance Maladie, mais dont on comprend mal aujourd'hui l'utilité, sauf pour quelques couples pour lesquels des chambres modulables pourraient être créées. Cela suppose une restructuration complète du Mont des Anges en réalisant à l'instar de ce que nous avons réalisé à L'Hippocampe des petites unités de 12 à 15 résidents pour optimiser la prise en soins ».
(Archives VdN 1/2009).
De l’humanisation aux unités Alzheimer en 20 ans.
De 1988 à 2008, la maison de retraite située au Mont d’Halluin a connu des bouleversements très importants.
Il y a d’abord eu l’opération d’humanisation de la maison de retraite lancée en 1988 à l’initiative du conseil général. Michel Plets, le directeur, se souvient d’un long et patient travail qui a consisté à relier les 2 ailes que constituait l’ancien hospice-hôpital construit au début du siècle en 1907 (ou par les Allemands en 1917 comme l’assure Michel Plets).
« On avait commencé par aménager une salle à manger au milieu des 2 ailes puis un nouveau bâtiment, une nouvelle cuisine », se rappelle-t-il.
La livraison des 2 unités Alzheimer inaugurées en décembre dernier complète ces changements.
« Je me souviens avoir accueilli une résidente qui avait été blessée durant la 1ère guerre mondiale là où elle a ensuite vécu sa vieillesse », termine M. Plets.
(Archives N.E., 8/3/2009).
L I E N S:
Delphine Duvoskeld-Destailleur ou la première centenaire halluinoise.
Trois frères, Trois artistes : Achille, Augustin et Paul Grimonpont.
L'Halluinoise Marie-Madeleine Fremaux Leconte... un siècle de vie.
Marie Speckaert et Julienne Verhas : 204 ans de longévité halluinoise !
Bertha Dhaene et Julien Lagae : Une histoire d'amour de 77 ans !
Célina Degryse..., l'éternelle joie de vivre, a rejoint Robert "son" artiste peintre.
L'association des seniors halluinois a organisé une réunion d'information sur les unités d'Alzheimer ouvertes à Halluin. L'occasion pour le public d'obtenir les réponses aux questions qu'il se pose.
Mardi 17 mars 2009, une réunion d'information était organisée à l'EPI. M Plets, directeur de l'Orée du Mont et des unités Alzheimer, le docteur Barbé, médecin de l'établissement, et Mme Cardinael, assistante sociale, ont présenté l'établissement, répondu aux questions d'ordre général et se sont tenus à la disposition de ceux qui voulaient poser des questions plus personnelles. La réunion a été ponctuée de témoignages poignants de proches de malades.
L'Hippocampe est constituée de deux unités de 12 lits chacune, chaque unité comprenant une place d'accueil de jour et un lit d'accueil temporaire. Le but de la structure est de préserver le plus longtemps possible l'autonomie physique et psychique du malade. On y accueille des personnes qui ne peuvent rester à domicile en raison de troubles du comportement : fugues, déambulation, agitation, agressivité, anxiété, désinhibition.
L'accueil de jour offre une alternative et une phase transitoire entre le maintien à domicile et le placement en institution.
L'hébergement temporaire intervient si le maintien à domicile est momentanément compromis : hospitalisation ou besoin de repos de l'aidant, travaux au domicile.
Voici les réponses apportées à tour de rôle par les trois intervenants, Michel PLets, le docteur Barbé et Mme Cardinael.
Quels sont les critères d'entrée ?
>> On ne prend que des personnes souffrant de maladies neuro-dégénératives (Alzheimer et maladies apparentées). La personne doit encore jouir d'une certaine autonomie physique, de façon à participer aux activités proposées.
Comment sont choisis les entrants ? Les Halluinois sont-ils prioritaires ?
>> Un dossier avec questionnaire médical est rempli par le médecin traitant. Il faut que le malade ait une relative autonomie physique mais présente des troubles du comportement qui perturberaient la vie dans une maison de retraite classique. La décision n'est pas définitive et peut être réexaminée en fonction de l'évolution de la maladie.
On tient compte du degré d'urgence et du secteur géographique. On accueille en priorité les Halluinois, puis les malades ayant de la famille proche à Halluin, puis les extérieurs.
Des ressources insuffisantes peuvent-elles empêcher l'entrée ?
>> Comme pour une admission en maison de retraite, les ressources personnelles du malade sont évaluées, ainsi que les possibilités d'aide des enfants, en fonction de leurs revenus et de leurs charges. L'aide sociale du département n'est sollicitée qu'en dernier recours. Il faut savoir qu'elle sera récupérable sur la succession.
Le prix est-il le même dans tous les établissements ?
>> Non. Les charges se répartissent mieux et le prix de journée est plus bas quand le nombre de lits augmente. Le prix de journée sera plus élevé à Roncq, où il n'y aura que 12 lits. A Halluin, le prix de journée est de 66,55 € en hébergement et 24 € en accueil de jour (plus transport).
Quel est la durée moyenne de séjour ?
>> On manque du recul nécessaire. Les soins apportés freinent la progression de la maladie, ils ne stoppent pas l'évolution. Tôt ou tard, les malades rejoindront l'EHPAD. Cette réorientation est souvent mal vécue par les proches, mais inévitable si on veut que l'unité Alzheimer puisse fonctionner.
(Archives N.E. 22/3/2009).
L’Orthophonie pour contrer Alzheimer
La prise en charge de la maladie d'Alzheimer est avant tout pluridisciplinaire. À l'Orée du Mont, certains patients sont notamment suivis par Zoé Vandewiele, orthophoniste qui intervient pour prévenir de la dégénérence et maintenir leurs capacités cognitives.
Assise à ses côtés sur le lit, Mariette (1) a aujourd'hui 72 ans. Elle est suivie en unité Alzheimer depuis avril 2009. Depuis elle rencontre son orthophoniste trois fois par semaine pour des séances individuelles et personnalisées.
« La maladie entraîne une perte progressive des fonctions cognitives. Contrairement à d'autres maladies neurologiques, ici, il n'y aura pas d'acquisition. Il s'agit de préserver et maintenir les capacités »,
explique Zoé Vandewiele. Aujourd'hui Mariette n'est pas très réceptive aux sollicitations de l'orthophoniste. Elle peine à dire son nom, à répondre par l'affirmative ou la négative aux questions que lui pose Zoé. Même quand la soignante lui souhaite un joyeux anniversaire et chantonne, elle ne réagit pas.
« Elle est très fatiguée, en ce moment. Là, elle n'a eu aucune réaction par rapport à l'événement. En général, quand on chante Joyeux anniversaire les gens ont quand même une mimique, un sourire associé ».Mais cet après-midi, Mariette s'endort au fur et à mesure de la séance.
Autre aspect majeur : la déglutition
Le suivi orthophonique des malades d'Alzheimer trouve sa pleine efficacité lorsqu'il est instauré dès les premiers symptômes. Dans la pratique malheureusement, il est souvent mis en place tardivement, quelquefois deux à trois ans après le début de la maladie.
L'objectif est ici d'optimiser le langage : « Pour maximiser la communication du patient. J'ai lu une fois : "Les besoins de l'être humain, c'est d'être aimé, d'être utile et d'exprimer ses émotions" ». Être aimé : en plus des échanges familiaux, ceux avec le personnel sont souvent très affectifs entre soignants et patients. Être utile : « Ils s'aident beaucoup entre eux. Ils ont besoin de materner, ça leur permet aussi de garder une dignité d'adulte ».
D'exprimer ses émotions, c'est là qu'intervient Zoé Vandewiele. « Pour préserver le langage verbal et non-verbal ». Mais aussi pour prévenir de l'apraxie - trouble de l'utilisation gestuelle - et de l'agnosie - trouble de la reconnaissance des objets visuels.
Lorsqu'elle arrive à l'Orée du Mont, Zoé Wandewiele a toujours dans sa sacoche sa boîte de cartes sur lesquelles sont imagés des mots simples : un chat, une voiture, une brosse à dent. « Le but c'est d'obtenir d'eux qu'ils disent le mot, ils auront quelquefois besoin d'ébauches ou de facilitateurs. Pour une fourchette par exemple on commencera par dire "une ffff...".
D'autres patients seront plus réceptifs si on leur décrit le mot par l'usage "ça sert à manger, on l'utilise avec un couteau"... » D'autres techniques stimulent le patient comme les fins de phrases automatiques : « on va chercher le pain chez le... boulanger » ou le récit automatique de série : les mois, les jours. « Il faut faire attention à ne pas infantiliser le patient. Mais plutôt surexploiter ses atouts pour créer un nouveau mode de communication. En priorité pour qu'il exprime ses besoins primaires. ».
Un autre aspect majeur du suivi, c'est la déglutition. « La maladie entraîne des spasmes inappropriés, notamment laryngo-pharyngés. Ce qui augmente le risque de fausses routes : avaler de travers ». Les liquides et solides s'accumulant peuvent entraîner le développement d'une pneumopathie.
« On va alors travailler sur le souffle, comme on l'a fait avec Mariette avec une paille. On incite le patient à avaler en baissant le plus possible le menton ».
Mais aujourd'hui, Mariette n'est pas décidée pour les exercices. Elle s'endort. « Depuis avril, elle a maintenu ses capacités de compréhension.En revanche elle a beaucoup perdu au niveau de l'expression », note Zoé. Un peu plus tard Mariette partagera avec les autres résidants son gâteau d'anniversaire. Et comme les femmes aiment les bijoux, elle recevra un collier et un bracelet... Sans prendre conscience que la parure honore ses 72 printemps. (1) le prénom a été modifié.
(Archives, N.E., 12.1.2010).
Les émotions au centre de la relation
Psychologue des unités Alzheimer d'Halluin et Roncq, Sylvia David vient d'y mettre en place, par petits groupes, la méthode de la Validation. Une approche qui a pour but de faciliter la communication avec les personnes âgées désorientées.
Alzheimer, Sylvia David y a été sensibilisée par un de ses proches atteint de la maladie. « C'est comme ça que j'ai commencé à m'y intéresser », explique la jeune femme de 26 ans, psychologue à l'Orée du Mont et aux unités Alzheimer d'Halluin et Roncq.
Après un Master II et plusieurs stages de terrain auprès d'enfants, d'adolescents et d'adultes, « je me suis dit que travailler auprès de personnes âgées pourrait être une expérience différente très intéressante ». Une expérience qu'elle poursuit maintenant depuis près de deux ans, tout en multipliant les formations en continu.
« Ce qui m'intéresse, c'est le contact, le fait de pouvoir soulager par la parole, l'écoute, la confiance qui s'installe au fil des entretiens », explique-t-elle, tout en soulignant que son métier n'a rien à voir avec la psychanalyse. « En suivant des enfants, on travaille forcément avec le cercle familial. C'est ce que j'ai retrouvé ici. » Avec un autre point commun : le trouble du comportement comme moyen d'expression.
Espace Snoezelen
À Halluin, l'Hippocampe est composée de deux unités Alzheimer de 12 lits chacune, dont 10 réservés aux résidents permanents. « À l'EHPAD, je propose un suivi psychologique sous forme d'écoute et de conseils », détaille Sylvia. Une mission différente de celle réservée aux unités Alzheimer « où il y a un travail de stimulation des résidents (ateliers mémoire), mais aussi un travail d'évaluation de l'évolution de la maladie et de proposition de sa prise en charge ».
Avec l'objectif d'établir un autre moyen de communication, l'Hippocampe s'est doté (dès janvier 2009) d'un espace Snoezelen, « une pièce rassurante » propice à la stimulation des cinq sens via des jeux de lumière, de la musique, des sensations tactiles, olfactives...
Autre méthode visant à renouer la communication : les petits groupes mis en place depuis deux semaines par Sylvia David, selon la thérapie de la Validation. « Prônée par Naomi Feil, j'utilise déjà cette méthode depuis un an en entretien individuel. » Son principe ? « On place les émotions au centre de la relation, cela passe par la reconnaissance de la personne et de ses sentiments » pour lui redonner confiance.
Sylvia passe par l'empathie : « Il faut laisser les résidents s'exprimer, chercher à réactiver en eux des émotions positives qui les aident à faire face à un présent pas très motivant, pas très intéressant. » En reformulant leurs sentiments, elle leur fait comprendre qu'elle est d'accord avec ce qu'ils ressentent, elle les aide à restaurer leur propre estime, à réduire leur stress, leur sentiment d'isolement et leur repli. « Je vais dans leur sens au niveau de l'émotion, mais pas dans les faits. Il ne s'agit pas de mentir si une résidente prétend qu'elle doit aller chercher ses enfants à l'école... ».
À Halluin, la majorité des résidents de l'Hippocampe ont plus de 80 ans. Ceux qui suivent la méthode de la Validation sont majoritairement en phase 2 (confusion temporelle) et 3 (gestes répétitifs) de la maladie. « Même dans des lieux de vie aussi petits, il est rare que les résidents communiquent entre eux. » Mais cette méthode, appliquée par groupe de 6 à Halluin, favorise les échanges.
Chaque séance a un déroulé précis : chacun tient un rôle selon sa personnalité (président, chanteur, secrétaire...). « Avec ce rôle, ils reprennent confiance et retrouvent une place dans la société. On est surpris de leur changement d'attitude. Ils sont transformés ! » Partant d'un problème du quotidien, là encore, les émotions sortent. « Et la séance fait ressurgir un vécu qui peut les rapprocher. »
Mais la psychologue met en garde : « l'objectif n'est pas de réduire les troubles du comportement, mais cela peut en être une conséquence... » En attendant, les résidents se rapprochent et, tout simplement, passent un bon moment. Une manière de maintenir des échanges. D'adoucir un placement parfois très difficilement vécu.
(Archives, VdN, 24/11/2010).