Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Publication relative à l'histoire de la ville d'Halluin 59250. Regard sur le passé et le présent.

La Guerre 1939 - 1945 - Halluin (37) La médaille des déportés, à titre posthume, pour Emile Persyn militant communiste et résistant.



 

Intense émotion, dimanche 5 novembre 1989, dans les salons de l’Hôtel de ville où M. Pierre Desmedt ancien déporté, officier de la Légion d’Honneur, remettait à Mme Blanche Persyn la médaille des déportés à titre posthume, pour son mari, militant communiste et résistant Emile Persyn.

 

S’adressant à l’assistance composée de la famille, de nombreux amis de M. Emile Persyn, des membres du conseil municipal, des membres des sociétés patriotiques, des porte-drapeaux, le maire conseiller général M. Alexandre Faidherbe qui a ouvert les portes de la mairie « la maison commune, celle de chaque Halluinois » à la sollicitation de l’Union locale des anciens combattants et de la section locale de l’A.R.A.C., dit combien est justifié l’hommage rendu ce jour à M. Emile Persyn :

 

« Toute sa vie durant homme de caractère et homme de conviction… il doit rester pour nous un modèle dont Halluin peut-être fier ».

 

A ce propos et faisant suite à une proposition de Mme Françine Vanoverberghe, conseillère municipale communiste, M. Faidherbe souscrit volontiers au vœu que soit dénommé  Emile Persyn, le foyer des anciens de la rue Gabriel Péri, après acceptation du conseil municipal.

 

« La disparition de M. Emile Persyn fait que la médaille sera aujourd’hui remise à Mme Blanche Persyn, son épouse. Ce n’est que justice si l’on prend en compte les années d’angoisse, de sacrifices, de renoncement, qu’elle dût vivre afin de rendre espoir et de soutenir un mari physiquement brisé.

 

Au travers de mon propos, c’est l’ensemble de la population halluinoise qui lui rend hommage et l’assure de son estime et de son respect » conclut le maire.

 

Il revint à M. Alfred Simono, président d’honneur de l’A.R.A.C., de rappeler la mémoire de ce militant communiste, franc-tireur et partisan, officier de liaison et de renseignements pour la région Nord/Pas-de-Calais/Somme.

 

Né en juillet 1920, Emile Persyn entrait aux Francs-Tireurs en mars 1941. Il avait 21 ans quand il fut arrêté le 24 octobre 1941, interné à Loos, Douai, Poissy, Blois, avant d’être livré aux Allemands par la police française en 1944, et de Compiègne dirigé dans des wagons à bestiaux sur le camp de Mathausen en Autriche :

 

« Sa volonté de vivre, sa solide constitution (les gens de mon âge se souviennent d’Emile Persyn footballeur), lui permettent de tenir jusqu’à la libération par la Croix-Rouge, fin avril 1945.


Le cauchemar est terminé si l’on peut dire, son état de délabrement le fait admettre à l’hôpital de la Fraternité à Roubaix, mais il ne retrouvera jamais plus son ancienne vigueur.


Titulaire de la Croix de guerre avec citation à l’ordre du régiment le 25 avril 1947, Emile Persyn était membre de l’A.R.A.C. et de l’U.F.A.C. ».

 

Emu comme tous l’étaient, M. Pierre Desmedt agrafa alors sur le coussin que tenait Mme Blanche Persyn, cette médaille des déportés remise à titre posthume.

 

Le chant des partisans filtra dans la salle, ajoutant encore à la solennité et l’émotion du moment.

   

Sensible au courage, à la modestie, à l’esprit du devoir de patriote


Directeur de l’école Jacques Brel à Roncq, enfant d’Halluin et fils d’une famille d’ouvriers qui entrèrent tout de suite dans la résistance, M. Johnny Mittenaere dont le père Marcel, ses oncles et son parrain Robert Mittenaere furent les compagnons de lutte d’Emile Persyn, se fit l’interprète de Mme Blanche Persyn.

 

Lui-même ancien combattant au titre de l’Afrique du Nord, il lutte pour que la troisième génération de feu, celle des Djebels, soit la dernière, mais qu’on n’oublie pas le sacrifice des uns et des autres, avec ou sans uniforme à l’exemple d’Emile Persyn :

 

« Qui furent ainsi les instigateurs et les artisans de la libération de notre pays, il y a de cela 45 ans » .

 

Le propos de M. Mittenaere se voulut la transcription des profonds sentiments de Mme Blanche Persyn, sensible au courage et à la modestie, à l’esprit du devoir de patriote, au souci de partage avec tous les compagnons de son mari, et en premier lieu M. Albert Verhellen qui fit équipe avec lui de 1940 à 1941.

 

Ce fut alors l’histoire d’Emile Persyn qui fit surface. Une histoire qui met en lumière le courage et les mérites de cet Halluinois trop tôt disparu, mais aussi l’action d’un résistant de la première heure.

L’évocation des faits qui vont suivre, vous permettra de mieux comprendre le profond engagement d’Emile Persyn dans la lutte antifasciste.  

 

L’Avant-garde

En 1940, sous la direction de Gustave Casier qui allait devenir maire d’Halluin à la Libération, Emile Persyn et Albert Verhellen récupèrent une machine à écrire, une ronéo, et un important stock de papier. Cette imprimerie clandestine fut installée d’abord impasse du Mamelon vert au domicile de Marcel Verfaillie. Puis, pour plus de sécurité, au Colbras, chez Cyrille Lagaé.

 

Le transfert du matériel fut fait sur une brouette par Marcel Verfaillie et Emile ; On frémit déjà là au danger encouru. Et s’ils s’étaient faits prendre ?

 

De cette modeste imprimerie sortirent des milliers de tracts anti-hitlériens sous le titre de l’Avant-garde, et qui seront diffusés dans tout ce coin du Ferrain qu’on appelle généralement Tourcoing/vallée de la Lys ;

 

Albert et Emile s’engageront dès sa création dans l’O.S. (organisation spéciale) chargée de créer des difficultés à l’armée d’occupation, O.S. qui deviendra peu de temps après les F.T.P.F. (Francs tireurs et partisans français), véritable ossature militaire de la région.

 

Dans la nuit du 13 au 14 juillet 1941 ? Emile et Albert iront accrocher des drapeaux tricolores sur les becs de gaz de tout le quartier Est d’Halluin. Geste plus que symbolique, car les couleurs nationales  fleuriront, malgré l’interdiction, dans les foyers ouvriers le lendemain, et seront la démonstration du patriotisme le plus ardent.

 

C’est dans la nuit du 24 octobre 1941 que va se forger le destin d’Emile Persyn.  

 

Dénoncé par la police française

Emile et Albert sont en possession de tracts bien imprimés reproduisant l’appel au peuple de France signé de Maurice Thorez et Jacques Duclos.

 

Déjà dans leur Avant-garde, ils ont reproduit des passages de cet appel. Cette fois-ci ils l’ont dans son intégralité. Ils décident d’aller le lancer dans les rues des quartiers de la Rouge Porte, de la Pannerie.

 

Mission accomplie avant le lever du jour, à vélo… On tremble à l’idée que s’ils avaient été surpris, ils étaient passibles de la peine de mort selon la loi allemande en vigueur dans la « zone interdite ».

 

Ils se quittent rue d’Arcole, aujourd’hui rue Lucien Sampaix. Emile remonte la rue de la Pannerie, et en débouchant rue Edouard Vaillant, aujourd’hui rue Gabriel Péri, il est aperçu par un policier français qui se rend à son travail. Il n’a plus de tracts sur lui, heureusement.

 

Mais la police française fera le rapprochement. Emile Persyn  sera dénoncé, pris par la police française qui le livrera aux Allemands… 

 

Forger l’esprit de résistance

On mesurera précise alors M. Mittenaere, le rôle néfaste joué par le gouvernement de Vichy qui mettait au service de l’occupant allemand toutes les institutions de l’Etat, l’importance et la haute valeur du message qu’Albert et Emile ont lancé dans les rues d’Halluin.

 

Avec l’appel du 18 juin 40 lancé par la radio de Londres, celui du 10 juillet 40 diffusé courageusement sur le sol même de la patrie a contribués fortement à forger l’esprit de résistance des Français. Voici le début de ce message :

 

« Jamais un grand peuple comme le nôtre ne sera un peuple d’esclaves. La France au passé si glorieux ne s’agenouillera pas devant une équipe de valets prête à toute les besognes. Ce ne sont pas des généraux battus, ni les affairistes, ni les politiciens tarés qui peuvent relever la France ? C’est dans le peuple que résident les grands espoirs de libération nationale et sociale… ».

 

Cet appel sera entendu des masses profondes de notre peuple, tant il est vrai, comme le notait l’écrivain catholique François Mauriac que « seule la classe ouvrière dans sa masse est restée fidèle à la patrie profanée ».  

 

« Ami, si tu tombes »

Emile Persyn « tombé comme on disait, emprisonné puis déporté en Allemagne, d’autres se lèveront et prendront sa place au combat :

 

« Ami, si tu tombes, un ami sort de l’ombre, à ta place », dit le chant des partisans. Et la première à prendre sa place, ce sera Blanche Persyn, précisément, qui ne s’est pas laissée abattre par cette épreuve terrible, qui a continué à cacher du matériel, à cacher des réfractaires au travail obligatoire, à encourager tous les actes de sabotage de l’appareil ennemi.

 

Pour conclure, M. Mittenaere exprima trois préoccupations essentielles : le recueil des témoignages de cette époque, avant que ceux qui en furent les témoins ne soient tous disparus, de voir la cérémonie d’aujourd’hui comme un hommage rendu avant tout à un résistant déporté politique, que le combat pour l’Indépendance de la France, pour la paix dans le monde, pour la liberté, la justice et le progrès social continue.

 

« Certes de nouvelles solidarités se font jour, en Europe particulièrement la réconciliation franco-allemande, l’amitié entre les peuples sont des données encourageantes. Il existe même une union européenne des anciens combattants « Mais le ventre est encore fécond d’où a surgi la bête immonde » comme disait Bertold Brecht.

 

Les manifestations de haine et de violence raciste, de xénophobie, d’intolérance religieuse, de soumission de la femme, se multiplient dans notre pays et nous atteignent dans notre dignité.

 

Les nostalgique du IIIe Reich relèvent la tête et remportent même des succès électoraux en Allemagne de l’Ouest sous la fausse étiquette de « républicains ». Ils rêvent de reconquérir les frontières de l’Allemagne de 1938 et mettent en cause tous les accords passés avec les Etats qui ont permis dans notre commune maison Europe de vivre en paix pendant 45 ans.

 

Sous leur pression et au plus haut niveau, on envisage la déstabilisation de l’Europe. La vigilance s’impose à tous. C’est bien donc ton combat qui continue, Emile. Et tu restes à nos côtés. Car comme le dit Victor Hugo :

 

  « Les mort sont des vivants mêlés à nos combats ».  

 

Emile Persyn, solide gaillard avant de « tomber », ne pesait plus 40 kilos à son retour à Halluin en 1945.

 

Le déporté de Mathausen, Conseiller Municipal d’Halluin de 1947 à 1953, nous a quittés le 30 janvier 1979 à l’âge de 58 ans. Le 3 février 1979 ses funérailles se sont déroulées à Halluin et l’inhumation au cimetière de la ville.

 

L’une des dernières photos le représentant fut prise lors du jubilé Victor Vandekerckhove (Baratte) en 1970. Nous le trouvions entre ses deux camarades de la formidable équipe de l’U.S.H de 1940, « Baratte » et Pierre Verholle.

 

(Archives D.D., Presse).

 

LIENS :

 

La Déportation en France : http://www.cheminsdememoire.gouv.fr/deportation.html

L'Histoire de la Déportation :
http://clioweb.free.fr/camps/deportes.htm

Le Bilan de la Déportation en France : http://www.memoire-net.org/article.

http://www.judaicultures.info/Visite-du-site-de-Dachau.html


La libération de Dachau : http://clioweb.free.fr/camps/deportes.htm#camps

La Libération des Camps : http://pagesperso-orange.fr/d-natanson/liberation_camps.htm

 

Auschwitz - Birkenau (Pologne)... La Libération du Camp, il y a 65 ans, le 27 Janvier 1945 - 2010.

 

Buchenwald (Allemagne)... La Libération du Camp, il y a 65 ans, le 11 Avril 1945 - 2010.

Hommage à Maurice Druon Co-Auteur du "Chant des Partisans".

La Guerre 1939 - 1945 - Halluin (16) Le Chant des Partisans.

 

Le 8 Mai 1945 : Fin de la Guerre en Europe.

La Guerre 1939 - 1945 - Halluin (18) Discours par André Malraux , le 19 décembre 1964, lors du transfert des cendres de Jean Moulin au Panthéon.

Le Conseil National de la Résistance fête ses 65 ans.

La Guerre 1939 - 1945 - Halluin (19) Pierre Hachin résistant, torturé, déporté et bâtisseur de Paix.  

La Guerre 1939 - 1945 - Halluin (21) Pierre Desmedt dernier résistant halluinois déporté 1914 - 2005.

Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article