Maud Ramaen, Halluinoise de 38 ans, est rentrée d'un périple d'un an dans la chaîne himalayienne. Émerveillement, peur et étonnement se conjuguent dans son témoignage.
Après 13 000 km de voyage dont 3000 à pied, en tandem avec Barbara, une partenaire qui lui était jusque-là inconnue, Maud Ramaen ébauche le récit d'une pérégrination furieusement humaine, quand le don de soi des peuples autochtones démunis prend le pas sur les insignifiances de notre quotidien.
Partie le 15 mars 2008, elle est rentrée un an plus tard, le 27 mars 2009.
« L'idée était de vivre ma passion pour l'alpinisme et de raconter la vie des gens dans les villages et la meilleure façon d'y parvenir, c'était de marcher », entame-t-elle.
Barbara, 30 ans, originaire du Sud de la France, a été sa partenaire de voyage. « Je ne l'avais rencontrée que 3 fois avant de partir. » Après un long voyage en avion, tout a débuté au Kirghizistan, pays qu'elle compare volontiers « à la Mongolie avec ses populations nomades, ses yourtes et ses hauts sommets ».
Dans l'avion, elle a fait la rencontre d'Aziza, une étudiante kirghize de retour chez elle après des études dans notre Hexagone que les populations locales ne situent pas.
La peur de sa vie
Durant l'absence de Barbara au mois d'août 2008, Maud va en profiter pour assouvir sa passion des sommets. Elle décide d'entreprendre 3 ascensions dont une avec succès, le Stock Kangri en Inde du Nord à 6200 mètres d'altitude, une autre sous l'orage et enfin une troisième qui a failli virer au drame.
« On était partis à plusieurs avec un guide professionnel, l'ascension a démarré trop tardivement, vers 10h », se souvient-elle, « Le guide a d'abord chuté de 5 mètres sur une pente à 60° et puis, dans la descente, la neige s'est soudain dérobée sous nos crampons, la cordée s'est transformée en catapulte et s'est stoppée juste au-dessus d'une crevasse. »
Malgré l'obstacle de la langue et l'apprentissage de plusieurs dialectes, Maud va s'enivrer de cette humanité à fleur de peau : « dans ces peuplades, les gens sont heureux malgré des conditions de vie hyper difficiles, ils ne se créent pas de besoins. Là-bas, les choses les moins bonnes ont une saveur délicieuse et quel réconfort d'être accueilli par un berger qui nous prépare le thé et les couvertures alors qu'on s'était égarées quelques minutes plus tôt ! »
Elles ont vécu tant de nuits sous la toile, des journées à ne croiser personne, dans la crainte de ne pas avoir suffisamment de nourriture quand il faut partager un oeuf en guise de repas ou une soupe chinoise sèche, mais les rencontres ravivent leur soif d'humanité.
« Les femmes kalash sont de vraies princesses au Pakistan, elles se battent pour maintenir la tradition tout en cherchant à faire évoluer leur région », reprend Maud Ramaen, « on a été accueillie chez une institutrice qui parlait anglais, Tulshahein, j'étais hors du temps. »
Interpellation en Chine
Cette traversée de pays jusqu'alors indéchiffrables pour Maud a été constellée de moments magiques, entre les 5 mois vécus au Népal, les 3 mois en Inde, etc. « Je me souviens de ces 10 jours passés dans un monastère pour femmes, je me suis même rasée la tête à cette occasion, cela a été à la fois drôle et dur, je me suis sentie asexuée mais c'était bon enfant ».
Tout n'a pas non plus été simple quand, en Chine, la police venait chez l'habitant ramener Maud et Barbara à l'hôtel, suite à des délations. « Les policiers chinois veulent garder la maîtrise des touristes », reprend Maud.
Les frustrations ont été légion comme l'impossibilité de franchir la frontière du Tibet. « Il aurait fallu un permis et un guide pour le faire mais la situation était tendue, il y avait le couvre-feu, on s'est donc arrêté toutes les deux à 60 km de la frontière où l'on s'est immergé dans cette imagerie que l'on pouvait rêver à propos du Tibet avec des cavaliers sur de petits chevaux, des moines dans les monastères, etc. »
Au final, elles ont dépensé 5 euros par jour lors de ce voyage, tant le coût de la vie dans ces régions est peu élevé. « Les gens vivent en autarcie et en communauté, regardent la télé ensemble autour d'un même poste, l'électricité solaire règne en maître dans un souci d'économie, les toilettes sont sèches, la vie écologique y est reine. »
À la fin du mois, elle reprendra son travail chez Decathlon. Sans être fétichiste, elle a ramené une tasse de thé en bois, « là-bas, on ne boit pas dans la tasse d'un autre, on nous attribue donc définitivement une tasse. »
(Archives N.E., 22/4/2009).
Dans un portrait qui lui était consacré (Magazine Municipal d’Halluin Février 2008), Maud Ramaen raconte :
« J’ai toujours eu le goût de l’effort et de l’aventure. J’ai notamment fait l’Amérique du Sud mais c’est un séjour au Népal, où l’an dernier, j’ai gravi deux sommets de plus de 6 000 m qui a constitué le déclic.
J’y suis allée pour la montagne mais, finalement, ce sont les gens de là-bas qui m’ont le plus touchée. A un point tel que j’ai décidé d’y retourner et d’y passer une année complète. Avec de grands défis physiques mais aussi la volonté de témoigner.
Une scolarité halluinoise (école Sainte-Marie, collège du Sacré-Cœur) puis tourquennoise (LICP) et enfin valenciennoise (maîtrise de finances), un emploi de cadre en comptabilité chez Décathlon : rien à priori en phase directe avec l’aventure.
Sauf un papa passionné de randonnée et une mutation professionnelle à Lyon avec la découverte du monde de l’alpinisme.
« J’ai adoré, reprend Maud. Quand on arrive au sommet d’une montagne, on éprouve un formidable sentiment de liberté. C’est fabuleux, c’est grandiose mais, sincèrement, c’est tout ce qu’il y a autour, la préparation du matériel, le dépassement de soi et l’obligation de solidarité qui règne dans une cordée, qui m’ont le plus « scotchée ».
Reportages et Photos, sur le site :
http://parlerdelles.over-blog.com/ – maud.ramaen@yahoo.fr