Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Publication relative à l'histoire de la ville d'Halluin 59250. Regard sur le passé et le présent.

La Guerre 1939 - 1945 - Halluin (36) 1939 (1) L'amour n'a pas de frontières ! et 1989 (2) des Noces d'Or... comme à la guerre ! Ou le récit détaillé de ces deux évènements historiques.



 

1939 : La France a déclaré la guerre à l’Allemagne fasciste. En cette période de troubles et de tourments, Roger, 23 ans et Marie-Louise, 20 ans s’aiment d’un amour tendre.

 

Lui est Français, elle est Belge. La France est en guerre, la Belgique est neutre. Et pour mieux marquer la frontière qui sépare les deux pays, une ligne de barbelés se dresse des deux côtés, à Menin et Halluin.

 

Chaque jour des dizaines de personnes se parlent des deux côtés des barbelés : des familles séparées mais aussi des amoureux qui se languissent de ne plus se voir. Comme Marie-Louise Velghe, jolie brunette au sourire franc et Roger Destoop, grand et beau jeune homme sérieux.

 

Roger et Marie-Louise sont fiancés depuis trois ans. L’attente est longue, la fin de la guerre n’est encore pas pour tout de suite, ils décident de se marier envers et contre tout et de briser les barbelés, à leur manière..

 

Il s’agit d’obtenir des autorisations ce qui n’est pas très facile. Roger et Marie-Louise se démènent, chacun dans leur pays respectif. L’amour est plus fort que tout, ils parviennent à leurs fins : la date du mariage est fixée pour le 3 novembre 1939.

 

Mais il s’agit aussi de préserver la neutralité de la Belgique. Ce jeune couple ne peut se marier ni à Menin, ni à Halluin. Qu’à cela ne tienne, l’union sera célébrée entre les deux villes, entre les deux frontières de barbelés.

 

« Nous en avions assez de ne pas pouvoir nous parler, explique 50 ans plus tard en 1989 M. Destoop. Ce mariage entre les deux pays était la seule solution ».

 

Le 3 novembre, une petite pluie fine tombe sur les deux villes. « Un vrai temps de Toussaint ! »  renchérit M. Destoop.

 

La noce est bien couverte. Chapeaux, manteaux de fourrure et cols douillets. Marie-Louise porte un joli tailleur, Roger une redingote et un nœud papillon. Le temps est gris mais les fleurs ne manquent pas, portées par brassées par les demoiselles d’honneur.

 

Amis,  famille et curieux se retrouvent dans ce « no man’s land ». Assis à une table en plein air, le bourgmestre de Menin rédige l’acte de mariage. Et sur les photos, tous sourient, heureux en ce jour de fête mais aussi étonnés de la situation. Car Roger et Marie-Louise sont les premiers à se marier ainsi.

 

« Il y en a eu d’autres ensuite, raconte Roger Destoop. La mode était lancée, mais comme la Belgique renonçait à sa neutralité au mois de mai, nous ne sommes pas nombreux à nous être mariés ainsi. Mais je me souviens qu’il y a un couple qui s’est marié à la frontière peu de temps après nous. Le lendemain de son mariage, le jeune homme repartait à la guerre et il n’est revenu que 7 ans après ! Il avait été fait prisonnier par les Allemands ».

 

M. et Mme Destoop ne subiront malheureusement pas une telle séparation. Mais le jour de son mariage, Marie-Louise doit accepter d’être séparée de sa famille. Les autorités ont accepté de laisser passer la frontière à la famille belge de Marie-Louise, mais uniquement pour une heure, pour la messe célébrée à Halluin.

 

« A croire qu’ils avaient peur des espions ! ». Marie-Louise en rit encore cinquante ans après.

 

Puis chacun retourne de son côté. Une partie de la noce fête l’évènement à Halluin, tandis que l’autre banquette à Menin. Marie-Louise est restée avec son époux.

 

Le lundi chacun reprend son travail. Ce n’était pas le moment de partir en voyage de noces. Roger fait un an de guerre puis est affecté dans une filature. Marie-Louise travaille en France aux Etablissements Demeestere.

 

50 ans plus tard, ce samedi 4 novembre 1989, leurs noces d’or seront célébrées en bonne et due forme. Tout d’abord en Mairie d’Halluin puis, comme il y a 50 ans, à la frontière en plein air. Le bourgmestre de Menin viendra y faire un discours.

 

« Si j’avais su tout ça, je ne serais pas allée à la mairie signaler notre anniversaire de mariage…, soupire Mme Destoop. Cette agitation l’effraye un peu. M. Destoop  semble en avoir pris son parti.

 

Après la fête, tous partiront faire la fête à Reckem, Fraçais et Belges réunis cette fois-ci Mais avant de partir M. Destoop s’étonne :

 

« 50 ans ! On se demande comment c’est passé, tellement ça va vite ! ». En voilà une belle déclaration d’amour.

 

 

Des Noces d’Or… comme à la guerre !  (2)

 

Fallait-il qu’ils s’aiment cet Halluinois et cette Meninoise qui se sont mariés par-delà les barbelés de la « drôle de guerre » ? Cinquante ans plus tard, M. et Mme Destoop Velghe sont revenus sur la frontière pour renouveler leurs vœux d’amour et de fidélité !

   

Le fil de deux vies.


M. Roger Destoop est né le 25 mai 1916 à Halluin, et son épouse née Marie-Louis Velghe a vu le jour le 27 août 1919 à Menin (B).

 

M. Destoop a commencé sa carrière professionnelle en 1928 comme papetier aux Ets Hamel-Van Gorp à Halluin, avant de partir comme teinturier à la Filature-Filterie de France à Comines, en 1938.  A partir de 1947  et jusqu’à sa retraite en 1981, il fut ensuite employé comme vernisseur aux Ets Vanhoutte, Desimpelaere, puis Dehondt à Halluin.

 

Quant à son épouse, elle fut successivement épeuleuse, ourleuse, puis piqueuse aux Ets Demeestere-Demeestere d’Halluin de 1933 à 1977. Elle est titulaire de la médaille d’Or du Travail.

 

De leur union est né un enfant, qui leur a donné un petit-enfant.

 

Les noces d’or ne sont plus ce qu’elles étaient, mon bon monsieur : aujourd’hui, on vit bien plus longtemps que jadis, et les couples quinquagénaires sont presque aussi nombreux que les Halluinois qui vont faire le plein en Belgique. Et pourtant les noces d’or célébrées ce samedi 4 novembre 1989, sur le coup de 11 heures étaient insolites à plus d’un titre…

 

Insolite d’abord parce qu’elles avaient lieu en plein air et à un endroit bien particulier : le « no man’s land », entre le café Bauduin et celui des Deux Nations, qui marque la frontière entre Menin et Halluin, entre la France et la Belgique.

 

Insolite ensuite, parce qu’elles furent célébrées conjointement par les premiers magistrats des deux villes, M. Alexandre Faidherbe pour Halluin et M. Bossuyt pour Menin.

 

Insolite enfin pace que ce n’est pas tous les jours que TF1 et FR3 dépêchent une équipe pour filmer l’évènement, somme tout banal, que constituent des noces d’or.

 

Et si la cérémonie était insolite, c’est tout simplement parce que les circonstances étaient exceptionnelles, jugez-en plutôt… Ce 4 novembre 1989, les noces d’or du couple Destoop-Velghe ont été célébrées à l’endroit exact où ils avaient été unis cinquante ans plus tôt.

 

Avec les barbelés en moins, et avec en plus une volonté commune des « politiques » de souligner le caractère symbolique de la manifestation, et d’affirmer les liens toujours plus étroits qui unissent Halluin et Menin :

 

« La cérémonie d’aujourd’hui n’a pas un caractère folklorique, a souligné M. Faidherbe : elle marque notre refus d’oublier ce qui appartient à la mémoire collective d’Halluin et de Menin, dans un lieu qui symbolisait hier la séparation, mais constitue aujourd’hui le trait d’union entre nos deux villes-sœurs ».

 

S’adressant ensuite au couple jubilaire, « héros d’un jour presque malgré vous ».  Le Maire leur souhaita de couler encore de très longs jours heureux dans leur maison de la rue du cardinal Liénart.

 

M. Bossuyt, bourgmestre de Menin, prit ensuite le relais pour relire, en flamand, l’acte du mariage célébré il y a cinquante ans.

 

Et tant M. Destoop que Madame renouvelèrent leur engagement d’il y a un demi-siècle : le premier avec un « oui avec plaisir ! » retentissant ; la seconde en déclarant, avec un zeste d’humour « Je veux bien s’il ne rouspète pas trop ! ».

 

Après la remise des traditionnels fleurs et cadeaux, la rue de Lille et la Rijselstraat furent rendues à la circulation, et c’est par un vin d’honneur servi à la mairie d’Halluin que prit fin la manifestation.

 

 

(Archives D.D., Presse).

Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article